Les « Afghans » et les chameaux en Australie. Violence, domination et guerre - Matteo Jeanbrau & Kenzo Jacquemin


« Si nous devions réaliser le bonheur de tous ceux qui portent figure humaine et destiner à la mort tous nos semblables qui portent museau et ne diffèrent de nous que par un angle facial moins ouvert, nous n’aurions certainement pas réalisé notre idéal. Pour ma part, j’embrasse aussi les animaux dans mon affection de solidarité socialiste. [.…] Je ne comprends pas le meurtre d’un animal ou d’un homme […]. »

(Élisée Reclus, 1884)

Table des matières

Introduction

Les chameaux et les « Afghans » dans l’outback australien

Leur arrivée

Identité nationale blanche australienne

Mode de vie et discrimination des « Afghans »

Le tournant

Les « Afghans » font du business

Les chameaux pris dans le sillon - I

Le tournant institutionnel

Les chameaux dans le sillon - II 8

Lutter contre l’Altérité

Construire des catégories

Faire la guerre

Conclusion

Bibliographie


 


Introduction 


La rédaction de cet article a débuté à l’aube de la mort par abattage aérien de 5 000 chameaux en Australie. Elle s’est terminée au crépuscule de ce massacre. Celui-ci a surgi dans les nouvelles internationales comme s’il était lié aux feux qu’ont ravagé l’Australie. Ceux-ci auraient poussés les chameaux jusque dans les villes où ils provoqueraient des dégâts et boiraient de l’eau (sic). Toutefois, je vais démontrer que ce massacre est ancré historiquement et qu’il est tout d’abord lié à un projet colonial, nationaliste et économique. 


Pour ce faire, je mobiliserai une approche anthropo-historique teintée du courant de l’history from below (voir Zinn, 2013) et de celui des critical animal studies (voir Nibert, 2002 ; Twine, Taylor, 2014). Tous deux préconisent l’engagement de nos productions scientifiques et j’ai tenté de faire en sorte que ce texte puisse être utilisé pour faire avancer tant la lutte antiraciste que la lutte antispéciste. C’est pourquoi l’utilisation de l’argot scientifique est amoindrie autant que possible et que j’ai écrit entre crochet la synthèse de chaque paragraphe – ou presque – afin de faciliter la lecture. Il ne s’agit pas d’arrogance mais d’effets de souvenirs de moi-même en train de lire des textes qui parlaient de la classe ouvrière et de la pauvreté. De beaucoup de ces textes je n’ai rien pu en sortir pendant longtemps tant les auteurs n’avaient pas écrit pour ceux dont ils parlaient. 


L’organisation du texte suit une ligne chronologique autant que le format écrit le permet. D’abord, j’esquisse l’histoire des chameaux et des chameliers en Australie : leur arrivée dans le pays, leur mode de vie et l’oppression, De cette histoire, je tire des analyses sur la construction de l’identité nationale (blanche) australienne. Enfin, j’analyse la construction des catégories discriminatoires ainsi que les motivations sous-tendant les oppressions auxquelles ont affaire les chameaux et les chameliers. 


Les chameaux et les « Afghans » dans l’outback australien 


Leur arrivée


[HARRY, MORTALITE, SACRIFICE] En 1840, Harry arrive en Australie. Il est connu pour être le premier chameau à être importé dans cette colonie bien que quelques-uns l’ont déjà discrètement précédé. Aussi puissants que puissent être les chameaux, Harry a été le seul survivant d’un lot de 6 (Scriver, 2004). Les cinq autres n’ont pas survécu au transport et cela risque bien d’avoir été récurrent les décennies suivantes. En effet, Violette Pouillard a pu montrer le taux de mortalité qu’amenait « la seule expérience maritime » qui « est rude pour les animaux » (2019, p. 67). Ainsi, le nombre de chameaux arrivés en Australie entre 1840 et les années 1920 ne représente qu’une partie de ceux qui ont été soumis au voyage maritime pour servir des missions coloniales, l’autre partie est celle des sacrifiés (voir Kilani, 2014). 

[FAIRE VENIR LES AFGHANS] De 1840 à 1859, il n’y a eu que 7 chameaux qui sont entrés vivants en Australie. Du fait de l’absence des compétences nécessaires à diriger des chameaux chez les Européens, l’importance de ces animaux dans les expéditions n’a pas tout de suite été reconnue. Aux alentours des années 1860, les colons ont alors décidé de faire venir les présupposés des chameaux : les « Afghans ». En effet, ces animaux à bosse seraient relativement inutiles à moins d’être accompagnés de leurs présupposés natifs et expérimentés (Jones, Kenny, 2010 ; Scriver, 2004). 

[LEGITIMITE, RÔLE] Bien que l’expédition Burke & Wills de 1860 a été un désastre en terme de perte humaine, les chameaux ont prouvé leur habilité à survivre aisément aux conditions rudes et sèches de l’outback australien, comparativement aux chevaux et bœufs européens (Deen, 2012). Cette légitimité reconnue et réitérée a fait venir en Australie plus de 20 000 chameaux et entre 2 000 et 4 000 chameliers entre 1870 et 1920 (Hanifi, 2013). Un véritable réseau de routes utilisées par les expéditions mobilisant ces êtres « exotiques » s’est établi à travers l’Australie (Deen, 2012). Ils ont alors joué un rôle crucial dans la plupart des missions exploratoires ainsi que dans les enquêtes scientifiques dans l’intérieur des terres australiennes (Scriver, 2004). Le duo chameaux – « Afghans » a aussi pris part à l’industrialisation de l’île puisqu’il était partie prenante dans le ravitaillement des mines reculées, des colonies et des avant-postes d’élevage pastoral (Hanifi, 2013).  


Identité nationale blanche australienne


[IDENTITE NATIONALE] L’arrivée des chameaux et des « Afghans » a permis la transformation de l’espace géographique de la prétendue terra nullius de l’Australie centrale (Scriver, 2004). Ces terres arides inexplorées par les blancs ont été mutées en une constellation de nouveaux endroits et sujettes à de nouveaux desseins – une nouvelle géographie dans l’imaginaire des colons. L’outback a été construit comme un symbole de l’Australie, le lieu de naissance de l’identité nationale australienne blanche (Claringbold, 2012). Une identité où les chameliers n’ont jamais eu de place (Scriver, 2004). En effet, leur histoire reste peu explorée et les quelques traces restantes – linguistiques et archéologiques - qui permettraient de l’écrire ne reçoivent que peu d’attention (Parkes, 2009 ; Joshua, 2018).


[IDENTITE NATIONALE ET LES CHAMEAUX] Aux débuts de l’importation de ce duo, les chameaux étaient plus sujets que les « Afghans » à l’assimilation dans la culture de l’Australie blanche. En témoigne le fait que les noms et le nombre de chameliers importés avec les chameaux étaient rarement enregistrés par les agents de la douane et de l’immigration du XIXe siècle, alors que les chameaux, eux, étaient méticuleusement comptés (Scriver, 2004). En effet, cette production de données couvre un effort d’appropriation des corps afin de les intégrer dans la société alors que les « Afghans » n’étaient pas sujets à ce contrôle puisqu’ils ne devaient être que de passage. Aussi, il a existé dès les années 1860 un effort d’élevage de chameaux (Scriver, 2004) dans des dépôts gouvernementaux afin de servir la police, les patrouilles des barrières et autres activités susmentionnées. Dans ces dépôts, il y avait un accord unanime sur le fait que les chameaux élevés sur le sol australien étaient généralement supérieurs que ceux qu’étaient importés. S’est alors propagée l’idée selon laquelle les Européens pourraient s’occuper des chameaux aussi bien que les « Afghans » (Gibbs et al., 2015). Dans le journal The South Australian Register du 27 janvier 1866 (sans auteur, p. 4), nous pouvons lire que « si nécessaire, les Européens peuvent s’occuper des chameaux aussi bien que les asiatiques… En fait, le chameau et le chamelier peuvent devenir aussi véritablement australiens que le bœuf et son présupposé » (Gibbs, Atchison, MacFarlane, 2015). Dans cet article, il s’agit bien de chameliers blancs qui pourraient devenir intégralement australien avec leurs chameaux élevés localement. Les « Afghans » n’étaient qu’un mal nécessaire à l’exploration de l’outback.


Mode de vie et discrimination des « Afghans »


[MODE DE VIE DES AFGHANS] Ces chameliers ne disposaient que de contrats qui s’étendaient d’un à trois ans au terme desquels il était attendu qu’ils retournent chez eux (Deen, 2012), ce qu’ils faisaient dans la plupart des cas (Parkes, 2009 ; Hanifi, 2013). Ces contrats ont particulièrement façonné leur mode de vie. Loin de chez eux, ils vivaient en communauté masculine telle une fratrie puisque leurs familles ne quittaient pas leur groupe d’origine (Parkes, 2009 ; Claringbold, 2012). Aussi, leur activité de chamelier leur faisait vivre comme des nomades à travers les terres arides de l’Australie, s’installant sur le bord des routes dans des campements semi-permanents, les Ghantowns (Parkes, 2009). Ceux-ci ont émergé avec la ségrégation des « Afghans » - mais aussi des aborigènes mobilisés dans les missions – hors des campements des colons (Kabir, 2005 ; Parkes, 2009). Parkes a montré à travers l’archéologie que les Ghantowns ont toujours été séparés et plus ou moins éloignés des camps blancs (2009). Dans certains endroits, le Ghantown était hors de la vue des colons. Conforme à la monoculture qu’a été érigée dans l’histoire officielle de l’Australie, chaque espace ne pouvait couvrir qu’un lieu homogène, comme si un espace ne pouvait pas couvrir une superposition de lieux (Parkes, 2009). 

[DISCRIMINATION DES AFGHANS] Si je place entre guillemets le substantif « Afghans », c’est parce que ces chameliers qui ont fait partie du paysage sur les routes du pays ont été bien mal nommés par les colons. Ces hommes faisaient partie de groupes ethniques, tribaux et linguistiques différents. Ils venaient principalement de régions qui ont ensuite été intégrées aux États-nations afghans et pakistanais (Parkes, 2009 ; Claringbold, 2012 ; Deen, 2012) - anciennement intégré au Raj Britannique - après qu’ils aient pris leur indépendance du Royaume-Uni. Selon Deen, ils ont maintenu leur identité à travers leurs dialectes, leurs traditions et leurs façons de s’habiller (2012). Ces nuances n’étaient pas perçues par les Européens qui les désignaient par des substantifs tout aussi péjoratifs les uns que les autres. Par exemple, ils les appelaient « Hindoos », « Turks », « Mohammedans », « aliens », « Afghans », et cetera (Scriver, 2004 ; Claringbold, 2012 ; Deen, 2012). 

Ainsi, en plus de l’aliénation sociale qui découlait de ces conditions de vie, ils étaient sujets à des préjugés - dont on garde des traces dans les journaux – alimentés par l’ostracisation sociale et les projets de loi des différents gouvernements (Claringbold, 2012).  


Le tournant


Les « Afghans » font du business


[BUSINESS DES AGHANS] Une poignée de chameliers n’en est pas restée à la vie de nomade. À partir de petits capitaux et de grandes idées, ils se sont lancés dans le commerce (Deen, 2012). Certains ont entrepris l’achat et la vente de chameaux en employant leurs comparses moins instruits, moins aisés et sans doute moins bien payés (Deen, 2012). Entre les années 1890 et 1905, le commerce des chameaux était à son apogée et les « Afghans » le dominaient. Mis à part le commerce de chameaux, ils se sont aussi lancés dans la ruée vers l’or dans l’Australie occidentale dès la fin du XIXe siècle (Kabir, 2005).  

[TRANSFORMATION DES RAPPORTS] L’extension des places occupées par les « Afghans » a tendu les rapports entretenus entre ces derniers et les blancs d’Australie. Le fait que ces hommes qui n’étaient pas censés s’établir dans la colonie ne se soient pas cantonnés à la subalternité et qu’ils aient pris des places de businessman, de propriétaires a attisé une haine anti-« Afghans ». Ils ont alors été publiquement construits comme une menace par les autorités et par les syndicats de la classe ouvrière blanche d’Australie (Deen, 2012). Leur ont été attribués des maux tels qu’un manque d’hygiène et de salubrité, un tempérament violent, une attitude misogyne et des intentions de destruction de l’Australie par l’intérieur (Claringbold, 2012). 

[LIGUES] Dès 1892, des ligues se sont créées pour lutter contre les « Afghans » mais aussi contre d’autres « races » asiatiques (Claringbold, 2012).  Les Charleville Camelphobists, la Anti-Alien Labour League  et la Anti-Asian League ont respectivement été constitués en 1892, 1893 et 1894 (Kabir, 2005 ; Deen, 2012). Ces ligues ont envoyé des dizaines de pétitions aux parlements afin de réduire l’afflux des « races inférieures et indésirables » et afin de « préserver les industries du pays à son peuple » (cité dans Kabir, 2005). Bien que ces efforts aient peu de succès au niveau institutionnel, le commerce des « Afghans » a commencé à faillir pour des raisons hors de leur contrôle, les autorités portuaires ont parfois refusé l’autorisation de décharger les chameaux des bateaux et les syndicats constitués par les « Afghans » faisaient faillite (Deen, 2012). La bataille était économique. 


Les chameaux pris dans le sillon - I


[INTERSECTIONNER AVEC LES CHAMEAUX] Les chameaux ne sont pas restés en reste dans ce tournant majeur qu’ont pris les colons d’Australie en cette fin de siècle. Alors qu’en 1866, on disait dans la presse australienne que les chameaux quittaient instinctivement les points d’eau pour laisser boire les autres animaux lors des missions (sans auteur, 1866), il était maintenant question de chameaux qui monopolisaient les points d’eau pendant que les chevaux et bœufs assoiffés attendaient des heures en espérant que ces points d’eau ne soient pas asséchés après le passage de ces animaux. 

En 1892, le texte d’une pétition des Charleville Camelphobists appuyait le fait que « les Afghans doivent partir, et ce même si les chameaux les accompagnent dans leur exode » (cité dans Kabir, 2005). Ces mêmes camelphobists tentait de persuader les autorités coloniales que les réserves de la ville étaient destinées à l’usage de ses habitants et non à celui des chameaux. Ceux-ci ne devraient pas avoir le droit de pâturer dans la ville (Kabir, 2005). 

Le 16 juin 1894, un des créateurs de la Anti-Asian League, Frederick Vospers, écrit dans une lettre ouverte publiée dans le journal Coolgardie Miner : « Nous craignons qu’une race humaine inférieure de bâtards dégénérés continue comme cela, et pour la protection de notre race anglo-saxonne, nous disons avec énergie : « oosthah ! » (un ordre donné normalement aux chameaux), ce qui signifie « à vos places ! », nous n’avons plus besoin de vous à présent » (cité dans Deen, 2012). Selon Deen, ces discours cachaient une crainte économique face à la place toujours plus grande que prenaient ces « Afghans » (2012). 


Le tournant institutionnel 


[1901 ACT, IDENTITE NATIONALE] En 1901, le processus vers la constitution de la Fédération d’Australie se conclu. Les terres intérieures soi-disant inhabitées ont été largement étudiées et cartographiées (Scriver, 2004). Selon Scriver, la nouvelle nation encore fragile des États (britanniques) australiens fédérés avait alors à cœur de s’affirmer moralement et légalement sur ce continent vide en construisant et en sécurisant ses barrières (2004). Les débuts de la motorisation des transports et l’extension des voies ferroviaires permettent la relégation des « Afghans » - ainsi que nombre d’autres immigrés non-blancs - à l’inutilité (Scriver, 2004). Ainsi, la même année que la constitution du parlement australien, ce dernier a légiféré sur l’immigration à travers l’Immigration Restriction Act, soutenu par tous les parlementaires fédéraux, de la frange gauche à la droite (Kabir, 2005). Cet Act était la pierre angulaire de la White Australia Policy qui a dominé les relations de race tant dans les sphères d’autorité que dans la population jusqu’en 1960 selon Scriver (2004). Il a été légiféré afin de dicter sur une base raciste – sous couvert de test linguistique - qui pouvait s’installer en Australie et qui ne le pouvait pas (Deen, 2012). Cela a réduit le nombre d’ « Afghans » à quelques centaines d’individus (Kabir, 2005). Le rôle historique qu’ont joué les « Afghans » dans l’étude de l’outback – symbole de l’identité nationale australienne – n’a pas été reconnu en tant que tel dans la culturel de cette nouvelle nation (Scriver, 2004). Mis à part le symbole, c’est aussi la reconnaissance en tant que citoyen qui leur a été refusé par cette White Australian Policy, ce qui a contribué à accroître encore la discrimination raciale et la marginalisation spatiale et économique (Scriver, 2004 ; Kabir, 2005). En outre, les tentatives politiques et d’apprentissage du maniement des chameaux (Hanifi, 2013) afin d’exclure les « Afghans » du commerce de chameaux ont été supplantées par l’introduction des véhicules motorisés. Ceux-ci ont contribué à définitivement écarter les animaux – et donc le duo chameaux-« Afghans » - des incursions dans l’intérieur des terres. Il ne restait alors que peu de place pour ces hommes sans emploi qui ont été contraints de travailler  en tant que colporteurs ou qu’ouvriers journaliers aux marges des grandes villes (Scriver, 2004). 

Selon Claringbold, la figure de l’« Afghan » révèle trois aspects importants de l’identité de l’Australie blanche (2012) : 

  • Une identité (blanche) fortement défensive et territoriale à caractère racial ;

  • Le besoin de maintenir une image idéalisée de l’Australie comme « bonne » (mesurée par rapport au « mal » de l’Autre) ;

  • L’anxiété et l’insécurité face à l'illégitimité non reconnue de la souveraineté de l'Australie blanche fondée sur l'invasion, la dépossession et le génocide des indigènes d’Australie. 


Les chameaux dans le sillon - II


[NOUVELLES TECHNIQUES + 1925 ACT] La motorisation de l’Australie dans les années 1920 et 1930 a balayé d’un revers de la main cette grande faveur qu’avait été faite aux chameaux d’appartenir à la nation australienne. L’époque où on pouvait lire dans les journaux que « le chameau et le chamelier [blanc] peuvent devenir aussi véritablement australien que le bœuf et son présupposé » (sans auteur, 1866, p. 4). Les systèmes de communication et de transport mécanique, à roue et télégraphiques qui ont été construits entre 1893 et les années 1920 avec l’aide cruciale des chameaux ont rendu superflus ces animaux (Hanifi, 2013) qui sont devenus des nuisibles. Les sources ont montré plus haut que les chameaux avaient été incorporés dans le discours anti-« Afghans » des ligues. En 1925, la discrimination envers ceux-ci prend elle aussi un tournant constitutionnel : Camel Destruction Act est légiféré. Cet Act donnait le droit aux individus appartenant à différents groupes sociaux d’abattre les chameaux intrus ou non-licenciés (Kabir, 2015). McKnight indique un déclin foudroyant du nombre de chameaux sous licence en Australie, passant de 12 734 en 1917 à 6 252 en 1929, et il n’en restait plus que 2 300 en 1941 (1969). Sur la base de ces chiffres Edwards a spéculé que 5 000 à 10 000 chameaux auraient été libérés par les « Afghans » dans la nature qui auraient refusé de les abattre (Edwards et al., 2004). 


Dès le début des années 2000, les chameaux ne sont plus seulement mis hors de l’identité nationale. En effet, la guerre menée contre leur prolifération est devenue un objectif mené au niveau national, regroupant tant les aborigènes que les gouvernements ou encore les industriels dans le secteur de l’élevage ou du commerce florissant de la viande de chameau. Ces parties prenantes s’associent dans un projet qui se veut national malgré les dissensions qui peuvent exister entre eux (Edwards et al., 2008). Des ressources importantes y sont consacrées ainsi que des programmes d’éducation publique (par exemple, NRMCC, 2007 ; 2010). Cette guerre en est venue à être tenue pour intrinsèquement et incontestablement bonne à travers tout le pays (Gibbs et al., 2015). Ainsi, selon Gibbs, cette guerre fait partie d’un projet de construction de la nation (Ibid). Il s’agit de reconstruire l’identité nationale à travers la protection de la faune et de la flore dites indigènes. Ainsi, le cycle se reproduit : tout comme les colons aspirait à construire une identité nationale pure et mono-culturelle, les parties prenantes de ces campagnes contre les espèces qui n’appartiendraient pas à l’Australie se lancent dans un projet de purification de leur faune et de leur flore afin de correspondre à leur image idéalisée de la nature.


Lutter contre l’Altérité


Construire des catégories 


[CATEGORIES, CONSIDERATIONS GENERALES] L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) et la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) décrivent les « espèces exotiques envahissantes » (EEE) comme des « menaces majeures et des moteurs directs de l’érosion de la biodiversité au niveau mondial » (IUCN, 2000, cité dans Gibbs et al., 2015 ; CDB, sans date, cité dans Gibbs et al., 2015). Ce paradigme autour des espèces envahissantes est répandu dans la gouvernance nationale et internationale de l’environnement ainsi que dans les discours (dans les législations, dans les campagnes d’éducation publique, dans l’imaginaire collectif, etc.) (Gibbs et al., 2015). 

Les adjectifs « invasif » et « exotique » ou en anglais « alien » et « feral » classent l’espèce concernée comme indésirable, dangereuse pour la biodiversité (ou les ressources locales). Plus encore, l’adjectif « feral » représente la destruction et la non-appartenance puisqu’il est opposé à celui d’ « indigène ». Ce dernier serait valeureux écologiquement et appartiendrait à son milieu (Gibbs et al., 2015), voire à « sa » nation. 


[CATEGORIES, AUSTRALIE] En Australie, les chameaux font partie d’un lot d’espèces classées comme marronnes ou nuisibles par le gouvernement. On trouve entre autres dans ce lot les lapins sauvages d’Europe, le renard roux européen ou encore les chats et les chevaux marronnes (National Biodiversity Strategy Review Task Group, 2009, p. 83). Les espèces nuisibles sont définies par les dommages qu’ils causent, ceux-ci étant plus grands que les bénéfices qu’ils rendent aux ressources prisées par les humains ainsi qu’au bien-être social (NRMCC, 2007). 


[IMAPCTS] Les rapports de recherche à propos du contrôle des chameaux forment un chœur unanime sur les impacts négatifs de ces animaux. Ceux-ci causeraient des dommages à la végétation, aux sources d’eau, aux sites culturels et aux infrastructures. Aussi, ils participeraient à l’érosion de la biodiversité et seraient en compétition avec les animaux indigènes quant à l’accès aux ressources (Edwards et al., 2008 ; NRMCC, 2007, 2010 ; Ninti One Limited, 2013). Cette science des impacts a fait émerger un discours des impacts et un discours autour des espèces invasives et destructrices (Gibbs et al., 2015). Les « impacts » sont mobilisés pour mettre en place des stratégies d’éradication basées sur des données « rationnelles ». Néanmoins, cette science met l’accent sur des moments de collision et, du même geste, balaie les connections complexes qu’existent au profit de simples corrélations (voir Head, 2008). Head (2008) soutient que cette approche par les impacts ne retient la variation que d’une seule variable tout en supposant une nature stable. Mougenot et Strivay soutiennent que « les connaissances que nous développons des animaux sont orientées par la nature de nos intérêts et de nos interactions. Elles créent des partitions dans le connaissable ; elles éclairent et elles aveuglent » (2014, p. 292).


Faire la guerre


[FINS ECONOMIQUES + « SAUVAGE » ET DOMESTICATION] Selon mon analyse, la guerre faite aux chameaux s’inscrit d’abord et surtout dans une tentative d’appropriation de ces corps à des fins économiques. Ces corps ne sont pas appropriés, ils sont « sauvages ». En effet, le « sauvage » a cette particularité d’exister en dehors du système économique capitaliste. Par exemple, le défrichage (c’est-à-dire la domestication du sauvage) est la première étape de tout projet d’exploitation de ressources naturelles. L’antithèse du sauvage, la domestication, est toujours une condition à la mise sous tutelle par l’autorité économique – et étatique. Le cœur du problème réside dans le fait que ces chameaux se trouvent en dehors du capitalisme et ne sont soumis à aucune propriété privée. Ils sont « sauvages » - comme l’indiquent les autorités australiennes. D’ailleurs, l’analyse des rapports met au jour le fait que si les animaux sauvages sont enfermés, domestiqués, et deviennent des biens dont on peut tirer du profit, les impacts négatifs qui leur sont liés disparaissent. Ils deviennent à nouveau innocents alors qu’il est indéniable que les animaux boivent de l’eau et produisent de la pollution, et ce qu’ils soient dans la nature ou enfermés dans des bâtiments. 

[VEGAN-AUSTRALIA] Face à cela, les membres de Vegan-Australia ont soutenu une solution qui, elle, pourrait ralentir la consommation d’eau dans le pays, diminuer le taux de pollution produit et amoindrir les maladies des animaux « indigènes » dans la nature : la fin de l’élevage endéans les 10 ans (Vegan Australia, 2016). En effet, une étude des impacts de l’élevage (FAO, 2006) met en lumière des conséquences bien plus désastreuses émanant de celui-ci que celles émanant du mode de vie des chameaux sauvages ou, plus largement, des animaux sauvages. Dans cette proposition de solution, la catégorie de « nuisible » se transforme. L’élevage des 30 millions de bovins domestiques en Australie revêt à son tour cette catégorie. 


[RETOUR AUX FINS ECONOMIQUES] Les rapports rédigés par les parties-prenantes dans le contrôle des chameaux sauvages (des gouvernements, des industriels dans l’élevage et dans le commerce de chameaux, des communautés aborigènes, des managers de ressources naturelles et des chercheurs) (Edwards et al., 2004 ; NRMMC, 2007 ; 2010 ; Edwards et al., 2008 ; Ninti One Limited, 2013) assument que le problème de ces animaux « sauvages » est qu’ils représentent des parasites économiques : ils ne contribuent pas à la richesse, ils s’en approprient. Le même mécanisme a existé autour des « Afghans » (Claringbold, 2012). Ainsi, les animaux sauvages sont construits comme « sauvages », « exotiques » et « nuisibles ». La particularité d’un animal « sauvage » - tout comme le sont les « sauvages » dans l’histoire de l’homme (voir Scott, 2019) – est d’avoir un corps qui n’est pas approprié par une autorité reconnue. 

[METHODES DE CONTROLE] Les trois seules méthodes de faire sortir une « espèce » – ou une « race » - de la catégorie de « sauvage » est le génocide – ce sur quoi s’est construite la nation australienne (Claringbold, 2012) – et/ou l’appropriation des corps par l’oppression et/ou l’établissement de barrières. Les rapports susmentionnés sont plein d’apprentissage sur ces méthodes puisqu’ils en prennent deux au sérieux : l’abattage de masse et faire de ces animaux un commerce (Edwards et al., 2008). Cette dernière solution est telle qu’elle constitue le titre d’un des rapports les plus importants de ces parties-prenantes quant à la gestion des chameaux sauvages : « Managing the Impacts of Feral Camels in Australia: a New Way of Doing Business » (Edwards et al., 2008).

[ABBATAGE DE MASSE] La première méthode a créé le buzz dans le monde en début d’année 2020. Suite à la mort de plus d’un milliard d’animaux directement causée par les feux exceptionnellement puissants de l’été australien 2019 – 2020 (Mayer, 2020), les autorités du pays annoncent une campagne d’abattage de masse de chameaux par hélicoptère. Finalement, 5 000 chameaux auraient été tués en cinq jours (Khaliq, 2020). Cette campagne, qui semble anhistorique, est profondément ancrée dans l’histoire de l’Australie. En effet, comme je l’ai montré plus haut, l’abatage des chameaux est permis depuis qu’a été légiféré le Camels Destruction Act de 1925. Cette méthode s’est systématisée avec le temps jusqu’à atteindre son apogée lors de la campagne de 2010 – 2013. Lors de cette période, la population des chameaux en Australia est tombée de moitié, passant de 600 000 à 300 000. Selon le rapport de 2013 (Ninti One Limited), 160 000 auraient été abattus pendant que l’autre partie aurait succombée aux feux et à la sècheresse qui ont été particulièrement farouches lors de cette période. 

[METHODES COMMERCIALES] Cependant, cette méthode est vivement critiquée par les industriels qui tentent de se lancer dans le commerce de chameaux mais aussi par des aborigènes qui voient, eux aussi, ces chameaux comme une possibilité pour des revenus d’argent. Cette méthode leur est contre-productive puisqu’elle permet d’abattre plusieurs milliers de chameaux et de les laisser rôtir comme des déchets dans la nature (AAP, 2009). En Australie, ce commerce se constitue depuis la fin des années 1980 (Edwards et al. 2008) mais rencontre toujours de grandes difficultés à s’implanter et à créer des bénéfices (Clarke, 2014). Les causes principales étant l’absence d’abattoirs adaptés et le coût de la chasse. Ce dernier est élevé dû au fait qu’il faut rassembler ces animaux vivants pour pouvoir les destiner à la consommation humaine. De ce fait, les industriels se préparent à organiser un élevage de chameaux qui serait plus rentable. Ceux-ci sont soutenus par les gouvernements australiens qui y ont investi pas moins de 4 milliards de dollars australiens entre 1998 et 2008 (Edwards et al., 2008). En plus de ces investissements, ils ont aussi développé les politiques et les lois associées à l’utilisation des chameaux (Carey et al., 2008).

[IRONIE] L’ironie du sort des chameaux d’Australie réside dans le fait que, d’un côté, les chameaux sont catégorisés comme n’étant pas de l’Australie, qualifiés de destructeur des ressources bush tucker (NRMMC, 2010), rejetés de l’identité nationale - malgré leur rôle décisif dans la construction de celle-ci – mais, d’un autre côté, leur viande est servie dans les restaurants touristiques des grandes villes australiennes comme un repas « bush tucker », c’est-à-dire traditionnel (Warfield & Tume 2000, p. 49 ; NRMMC, 2010, p.7). 

L’analyse des rapports met au jour que si les animaux sauvages sont enfermés, domestiqués, et deviennent des biens dont on peut tirer du profit, les impacts négatifs qui leur sont liés disparaissent. Pourtant, il est indéniable que les animaux boivent de l’eau et produisent de la pollution, et ce qu’ils soient dans la nature ou enfermés dans des bâtiments. 


[IRONIE] En retournant du côté des « Afghans », nous pouvons remarquer que cette ironie susmentionnée semble être répandue. En 2004, Scriver a écrit un article pour la presse à l’occasion de la conclusion de la prolongation de la voie ferrée reliant la ville d’Adélaïde (sud de l’Australie) à Darwin (nord de l’Australie). Cette ligne a la particularité d’avoir été construite grâce à la participation des « Afghans », bien que cette ligne ait fait disparaître leur métier. En effet, les trains véhiculés sur ces rails ont remplacé les chameaux. Cette ligne a été nommée « The Ghan Line » en l’honneur des « Afghans » - alors que nous savons que ces appellations étaient erronées et péjoratives. Scriver a donc écrit cet article où il rend un bel honneur aux « Afghans » et rappelle dans son épilogue que le contexte dans lequel s’ancre cet hommage est terrible. En effet, les mêmes afghans et afghanes, un siècle plus tard, fuient leur pays en guerre et certains d’entre eux se retrouvent en Australie, où ils vivent une expérience similaire à celle des chameliers, ceux à qui l’hommage est rendu. L’expérience est faite d’un grand espace où il n’y a pas de place pour eux, alors relégués en tant qu’illégaux par les gouvernements dans des camps de détention écartées des belles villes australiennes – comme l’avaient été « Afghans » dans les Ghantowns (Scriver, 2004). 


Conclusion


Tout au long de l’article, j’ai cherché à montrer que les « Afghans » et les chameaux d’Australie sont historiquement indissociables. L’histoire de l’exploitation de ces chameaux en Australie n’a été possible que par l’existence de l’exploitation des « Afghans » importés dans le pays. Lorsque je parle du duo chameaux – « Afghans », c’est bien parce que l’exploitation des premiers n’aurait pas pu exister sans l’exploitation des seconds, et inversement. De plus, comme nous l’avons vu, les chameliers ont été, à cette période de l’histoire où le darwinisme social dictait les relations raciales, rattachés d’une certaine manière à la « nature » par les européens. Le « ooshtah ! » (ordre normalement destiné aux chameaux) lancé aux « Afghans » (voir supra) pour qu’ils retournent à leur place/chez eux n’est pas qu’un fait divers, il prend place dans un paradigme social où les noirs et les animaux ne sont pas perçus de manière si distincte par les blancs. L’analyse de ces deux groupes sociaux sous forme d’un duo est donc justifiable par les données et m’a permis de déceler une structure sociale qui s’est construite sur et autour de celui-ci. L’intention centrale de ce travail est justement de montrer comment cette structure a façonné chaque partie de ce duo par des mécanismes semblables et comment l’oppression des animaux alimentent l’oppression des hommes, et inversement (voir Nibert, 2002). Brièvement, ces mécanismes relevés sont 

  1.  La construction de l’identité nationale australienne par le rejet de ce qui est défini comme étant l’altérité ;

  2. La ségrégation spatiale de cette altérité ;

  3. La construction sociale de cette altérité ;

  4. La puissance avec laquelle les institutions et les autorités étatiques peuvent agir sur les corps ;

  5. Les effets de nouvelles techniques ;

  6. Les corrélations entre phénomènes économiques et sociaux ;

  7. L’ironie qui peut exister dans le social. 


Malgré le point d’honneur que j’ai mis à déceler l’homogénéité du mode de domination, l’idéologie et la structure communes qui se sont construits autour et sur ce duo, je soutiens aussi l’analyse des spécificités propres à chaque structure de domination. Sous cette approche, il aurait alors été possible de spécifier comment les idéologies raciste et spéciste agissent chacune à leur manière. Bien sûr, ces deux modes de domination ne sont pas réductibles l’un dans l’autre mais, pour ce travail, j’ai plutôt cherché à montrer les connections qui existent entre eux, la façons dont ils se nourrissent l’un et l’autre. 

L’analyse en partant du duo de deux parties exploitées place en second plan la domination spéciste qui a existé entre les « Afghans » et les chameaux. Il va sans dire que les premiers ont tiré un profit du travail de ces derniers. Sans oublier que ceux-ci venaient de réseaux de domestication implantés sur les terres d’origines des « Afghans ». Le commerce international de chameaux a été possible parce qu’il existait déjà une structure spéciste sur ces terres. D’ailleurs, ultérieurement, ce commerce pourrait faire l’objet d’une étude. 


Outre cette perspective, il pourrait aussi exister l’étude des élevages de chameaux qui ont pris place en Australie dès les années 1860, c’est-à-dire lorsque ces animaux ont véritablement commencé à faire partie du paysage. J’ai pu accéder à peu de données concernant ces élevages mais il me semble qu’une attention historique et anthropologique devrait être prêtée à ce phénomène tant il semble avoir été révélateur de la volonté d’intégration des chameaux dans l’identité nationale de l’Australie blanche.


Enfin, une analyse des politiques de conservation imposées aux chameaux en Australie serait une étude de cas pleine de leçons. En effet, les organisations de conservation en Australie se sont intimement liées à l’industrie de la viande de chameaux afin de soi-disant gérer la population de ces derniers. Cette liaison est telle que les rapports de recherche dans lesquels sont impliquées ces organisations, des conseils et des lignes directrices sont données à ces industriels afin de rendre plus viable leur commerce (Edwards et al., 2008). Aussi, cette analyse permettrait d’affûter la réflexion qu’a lancée Violette Pouillard (2019). Elle propose d’analyser la manière dont les politiques de conservation font du monde un zoo. 


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